Zusammenfassung
Albert le Grand qualifie le rôle du maître par rapport à son disciple de manuductor (celui qui conduit par la main), notamment lorsqu’il évoque l’apôtre Paul qui transmet ce qu’il a vu à ceux qu’il guide « en les conduisant par la main ».
Or, Albert le Grand ne propose pas d’analyse conceptuelle de cette « manuduction ». La méthode suivie ici pour éclairer cette « figure » de médiation consiste ...
Zusammenfassung
Albert le Grand qualifie le rôle du maître par rapport à son disciple de manuductor (celui qui conduit par la main), notamment lorsqu’il évoque l’apôtre Paul qui transmet ce qu’il a vu à ceux qu’il guide « en les conduisant par la main ».
Or, Albert le Grand ne propose pas d’analyse conceptuelle de cette « manuduction ». La méthode suivie ici pour éclairer cette « figure » de médiation consiste à suivre le réseau des textes ayant en commun l’emploi du mot en question ou des termes apparentés. Ces textes proviennent de diverses parties de l’œuvre d’Albert le Grand, relevant de disciplines distinctes (philosophie, exégèse, théologie). Quels traits caractéristiques de la manuductio se dégagent-ils de ces textes à partir des questions suivantes : en quoi cette figure de la médiation est-elle nécessaire ? En quoi consiste la manuductio ? Cette médiation du manuductor est-elle appelée à demeurer ?
Il en ressort que le terme manuductio indique qu’il existe deux raisons qui rendent nécessaires les médiations sensibles dans la connaissance : en premier lieu, l’écart entre la fin intelligible de la connaissance et son processus d’abstraction qui part du sensible et, en second lieu, la conjonction de l’intellect humain avec le sensible. Il faut donc apprendre à utiliser les images comme des médiations vers ce qui leur est incommensurable. Le processus de connaissance consiste, par la suite, à les dépasser pour conduire à ce dont elles sont signes. Ainsi, toutes les médiations « manuductrices » ont en commun d’être composées de deux éléments hétérogènes – sensible et intelligible – et d’être aptes à faire passer du multiple matériel à « l’un spirituel », du connu à l’inconnu. Qu’est-ce donc qu’apprendre, à la lumière de la manuductio ? Le « maître de vérité » est celui que l’on croit au sujet de ce que l’on ne connaît pas directement, car il sait user des médiations prenant appui sur « l’analogie corporelle », afin de nous « conduire par la main » vers la connaissance des choses spirituelles. Ce qui semblait ainsi impossible, pour le disciple ignorant, devient ainsi, grâce à la médiation du maître, possible : croire en l’inconnu. Si la médiation manuductrice des images ou du maître est si liée à la nature humaine qui conjoint le sensible et l’intelligible, ne doit-elle pas alors nécessairement demeurer ?